La guerre des boutons

Si j'aurais su, j'aurais pas venu : les moustiques, c'est l'une des plaies de l'Afrique (pas uniquement mais c'est tout de même une grosse partie). En fait, ç'aurait pu être une des plaies d'Egypte que ça ne m'aurait pas surpris. Le moustique aime la chaleur. C'est pour cela qu'il se développe particulièrement bien en Europe pendant la période estivale.

Le problème ici, c'est que la température de l'été en Europe, c'est la température en hiver au Burkina Faso. D'où une plus forte propension du moustique à se développer. Il faut cependant reconnaître que comme les Burkinabés, le moustique africain est frileux. Alors que j'étais constamment en nage au mois de décembre, que je me promenais en chemisette la nuit et que j'hésitais à mettre le ventilateur (non, pas la clim tout de même, il y a des limites à ne pas dépasser :D), les burkinabés se couvraient de plusieurs épaisseurs, disaient à tout bout de champ qu'il faisait froid et que c'était à la limite du supportable (20-25 degrés). Pour les moustiques, c'est pareil, à 20 degrés, il fait froid et c'est plus difficile pour eux de se reproduire. Pourtant, je trouve qu'il y en avait déjà beaucoup. Je parle au passé parce que depuis un mois environ, il y en a beaucoup moins, je trouve. C'est certainement dû au fait que la plupart des bassins hydriques commencent à être à sec, ce qui ne favorise pas trop leur développement.

Le moustique c'est une plaie. Et ce pour de multiples raisons :

  1. D'abord, c'est laid . A part Mme Moustique et le chercheur en mousticologie, je ne vois personne d'autre qui lui trouve du charme. Et encore, je ne suis pas sûr pour le dernier. Avec son petit corps noir et ses deux ailes transparentes parfois zébrées de noir (c'est plus dangereux si c'est zébré, ce peut alors être des moustiques à palud), il n'y a vraiment rien d'attrayant en eux.
  2. Ensuite, ça n'a aucune éducation : toujours en train de faire du bruit quand on commence à se concentrer, à se poser sur les gens en les chatouillant quand il ne faut pas bouger et à déranger en permanence tout son entourage. Un peu comme une mouche. Une plaie aussi celle-là. Il faudrait réellement créer une école pour moustiques gentleman. C'est une idée à creuser : je suis sûr qu'il y a moyen de se faire de l'argent avec ce concept (si les moustiques ne sont pas éradiqués d'ici là).
  3. Ca ne sert à rien. A part transmettre le palud et autres maladies associées, le moustique a pour seul rôle de nourrir les geckos. Geckos qui n'ont d'ailleurs pas d'autre rôle que de manger les moustiques. Donc, c'est tout bon, on peut supprimer les deux à la fois. Le problème est celui de la synchronisation : si on tue tous les geckos trop tôt, il y aura trop de moustiques. Si on tue tous les moustiques, les geckos mourront de faim, ce qui est cruel (mais bon, c'est aussi l'objectif à atteindre. Que je suis sadique!!!).
  4. Enfin, en tout dernier lieu, le moustique est une plaie parce qu'il transmet des maladies : le palud principalement mais il y a aussi la fièvre jaune et autres consorts. Mais contre le palud, il y a l'arme absolue, l'arme fatale : la savarine.Quelle ne fut pas ma stupeur lorsque j'ai appris qu'au Burkina, il y avait au moins deux souches de palud dont l'une était savarino-résistante. Donc, si on compte bien, quand on se fait piquer, 3 cas se présentent :
    • c'est un moustique "sain" (pour autant qu'il puisse l'être) et on n'a rien
    • c'est un moustique à palud résistant et on tombe malade
    • c'est un moustique à palud non résistant et la savarine remplit son rôle.
    Faudrait faire un sacré calcul mais comme la savarine ne sert que dans un cas sur les trois (non pondéré, c'est pour cela qu'il faut une étude ), il faut réfléchir à deux fois avant d'acheter le produit - car ce n'est pas gratuit. Il y a également d'autres produits plus puissants mais toujours pas absolus et en plus, plus chers -.

Contrairement à son homologue européen, le moustique africain est de type agressif. Alors que les moustiques d'Europe attendent sagement que nous nous endormions pour nous piquer en douceur un peu de notre sang (enfin, quand ils sont bien éduqués ), les moustiques burkinabés tombent rapidement sous la coupe de leurs passions impulsives et ne prennent plus le temps d'attendre : ils passent à l'attaque même lorsque les humains sont éveillés.
Ils ont d'ailleurs une sacrée tendance à attaquer les Européens, ou, plus précisément, les blancs. Selon l'explication donnée ici, les blancs auraient la peau plus sucrée que les noirs ce qui attirerait plus les moustiques. C'est peut-être aussi parce que les noirs ont été tellement piqués avant qu'ils ont la peau tannée, donc dure ce qui gène les moustiques ;). Enfin, moi, j'ai mon avis personnel sur le sujet : les moustiques sont racistes et ils sont envoyés par les partis anti-colonialistes - car l'implantation étrangère en Afrique, n'est-ce pas à mot couvert une façon de prolonger par l'économie le temps béni du colonialisme ? Sauf que maintenant, c'est légal - pour chasser l'envahisseur du pays. Enfin bon, il semble que je sois bien seul à défendre ma version. Les gens ne me prennent pas au sérieux - ce qui ne veut pas dire que j'ai forcément tort.

Revenons donc à l'attaque. Dès que c'est possible, le moustique attaque en groupe. Car, comme tout le monde le sait, les escadrilles de mosquitos, ça fait mal . Ainsi, alors que quelques uns détournent l'attention en tournant effrontément autour de la tête de la cible, les monstres goulus attaquent ses jambes et ses bras dans l'espoir de pouvoir sucer en un court instant une perle de sang chèrement gagnée. Ensuite, c'est redécollage et changement de rôle, les commandos de première ligne désirant également prendre leur part du butin.

C'est une vraie guerre que nous livrent les moustiques. Et dans la guerre, il n'y a pas de pitié qui tienne. Et, bien entendu, il y a des morts. Plus dans un camp que dans l'autre d'ailleurs. Les armes que nous avons à disposition :

  • Le flacon anti-moustiques qui éloigne les moustiques et les oblige à se concentrer sur certaines parties du corps où il est plus aisé de les tuer.
  • La bombe insecticide qui asphyxie les moustiques et les fait mourir. C'est un moyen radical quand il y en a beaucoup.
  • Mais le meilleur moyen reste encore de les tuer à la loyale en les écrasant dans les mains. C'est peut-être la seule utilité qu'ont réellement les moustiques : nous maintenir en forme. Car c'est presque un sport. Agilité, adresse, attention, précision, vitesse et observation sont les qualités requises pour le pratiquer. Dans les bons jours, j'arrive presque à tenir les 10 moustiques/jour. Mais ce n'est tout de même pas très souvent les bons jours, il y a trop d'inconnues et d'aléas pour arriver à 10. En moyenne, c'est plutôt 5 et ce n'est tout de même pas si mal. Même s'il paraît, dixit P. que je perturbe l'ordre écologique.

Il est également possible de retourner certains instruments en armes. La moustiquaire, censée nous protéger, devient une cage pour le moustique qui aurait réussi à s'y infiltrer, cage dans laquelle, après qu'il ait mené sa chasse à l'homme, je me livre à la chasse au moustique.

Enfin, pour terminer cette sublime :-) réflexion sur le moustique, je conclurai sur la perversité du moustique burkinabé. En effet, celui-ci est un vrai combattant qui connaît bien son métier et qui en possède toutes les astuces : quand on est touché, se laisser tomber en piqué sous les nuages pour laisser croire à l'adversaire que son coup a porté. Puis, lentement, réduire les gaz et remonter de façon à arriver derrière l'assaillant pour inverser les rôles. Le moustique touché, ici, se laisse tomber sur le sol. Puis profitant de l'instant d'inattention lié à la liesse d'avoir enfin eu ce moustique qui me tournait autour depuis au moins 10 min, il redécolle pour réattaquer aussitôt. Une fois, au moment où j'allais porter le coup final à l'adversaire au sol, je l'ai vu redécoller sous mes yeux. L'impression ressentie est réellement étrange car on se sent vraiment ridicule de s'être laisser berner par un moustique.

Cependant, l'avantage, c'est que le moustique, ici comme ailleurs ne peut s'empêcher de revenir à l'attaque et au second coup, il n'a plus la chance de la première fois. Mais pouvait-il faire autrement que de suivre son instinct ? J'en doute, car dans moustique, il y a tic :p.

Et en y repensant bien, j'avais su et j'ai venu ;) 



07/07/2007
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